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DEMARCHE PRELIMINAIRE

 De "l'urbanisme(s) ?" ...

La pépinière urbaine évolue dans l'univers conceptuel de l’urbanisme transitoire ou temporaire, lui-même constitué d'une multitude de notions et de termes, plus ou moins proches les uns des autres, parfois quasi synonymiques. Cette accumulation de termes dans la théorie et la pratique est susceptible de compliquer la compréhension du contexte conceptuel.

Nous avons tâché de clarifier le cadre conceptuel à travers la littérature académique, en y repérant tous les termes qui gravitent autour de l'urbanisme tactique, éphémère, interstitiel ou transitionnel (pour n'en citer que quelques exemples), d'abord dans des contextes issus des Nords, ensuite dans ceux des Suds. En effet, cette ouverture internationale était essentielle pour notre recherche et elle nous a d'ailleurs permis de nous confronter à des termes anglais ou espagnols tels que urban hacking, third generation urbanism (Casagrande, 2016), urban acupuncture (Lerner, 2014), open-source urbanism, urbanismo de código abierto (Tato, Vallejo, 2012) et urban guerilla (Hou, 2019).

A partir de ce travail de recherche, nous avons pu constater deux 'notions-repères' : le droit à la ville et les communs.

Concept élaboré par Henri Lefebvre, dont le livre homonyme a été publié en 1968, le droit à la ville constitue, à l'origine, un projet révolutionnaire et radical, un processus « ouvert » (Purcell 2014 : 145), envisagé comme un « droit à la liberté, à l'individualisation dans la socialisation, à l'habitat et à l'habiter (...) à l'œuvre (à l'activité participante) et droit à l'appropriation (bien distinct du droit à la propriété)» (Lefebvre 2009 : 125). Avec cette notion, Lefebvre s'oppose à la planification fonctionnaliste et à la production marchande de la ville qui néglige l'aspect social. Il réhabilite ainsi l’espace comme lieu social de vie urbaine et non comme simple espace géométrique et rationnel.

Depuis, l'usage du terme s'est répandu et diversifié, s'éloignant souvent de l'évocation politique radicale des débuts pour actualiser sa compréhension vis-à-vis d'une ville aux dynamiques de production changeantes et au spectre élargi (Lecoq 2018 : 1). Ainsi, le droit à la ville s'invite dans les politiques urbaines et les initiatives citoyennes comme argument pour faire valoir des discours ou des stratégies parfois contradictoires. Il a trouvé une résonance particulière dans les pays des Suds, notamment en Amérique latine.

 

 

La seconde notion-repère est celle des « communs » , qui s’inscrit dans le sillage de la pensée lefebvrienne sur la ville comme œuvre collective. Si la question des communs paraît initialement liée à la rareté des ressources (Garrett Hardin décrète la « tragédie des communs » en 1968 ; réponse d’Elinor Ostrom en 1990), elle dénonce, à partir des années 1990, les mécanismes d’enclosures et de dépossession, provoquant un regain d'intérêt auprès de nombreux auteurs (Klein 2001 ; Linebaugh, 2008 ; Hardt, Negri, 2009 ; Federici, 2011 ; Harvey, 2012 ; Dardot, Laval, 2014) mais aussi des citoyens.

 

Dans le contexte néoliberal de financiarisation de la production urbaine et de prédation des ressources, notamment dans les Suds, la reprise de ce concept a donné lieu à des initiatives citoyennes pour la réappropriation et la réinvention de l’espace urbain, la création de nouvelles formes de vivre ensemble. L’espace produit par ces nouvelles pratiques apparaît comme un espace hybride -fait de lieux mais également de flux sur internet et sur divers réseaux sociaux- qui multiplie le message et les relations et appelle à la participation directe à l’aide d’un grand répertoire d’actions (Festa 2016 : 240).

Besson (2018) définit, d’ailleurs, ces communs comme un «  activisme de la vie quotidienne » ou « comme « l'expérimentation par le faire»  de la fabrique de la ville. Ces formes de rassemblement et de contestation, qui renvoient souvent aux ruses et tactiques telles qu’envisagées par Michel de Certeau, s'inspirent des tactiques des groupes subalternes pour créer des mouvements citoyens bottom-up et de nouveaux espaces « inventés »  (Stavridis 2018 : 170).

Le Brésil est l'un des premiers pays à s'être inspiré de ce droit à la ville avec sa loi "City Statute" qui traduit un changement de regard sur l'espace urbain qui n'a plus une simple valeur marchande mais aussi des fonctions sociales complexes (Purcell, 2014). D'ailleurs, le droit à la ville a eu une résonance particulière dans les pays des Suds, notamment en Amérique du Sud où l'on constate une reconnaissance constitutionnelle des droits au logement, aux services urbains et d’autres initiatives comme celle du budget participatif (Morange et Spire, 2017).

Exemple

Les laboratoires citoyens de Madrid naissent dans un contexte politique particulier : le mouvement des Indignados ne cessent de dénoncer les inégalités sociales et la déconnexion entre élite et société civile. Une vingtaine de Laboratorios ciudadanos se sont alors développés dans les espaces vacants de Madrid  sans planification mais plutôt de l'élan spontané de citoyens et de collectifs spontanés. Ils constituent ainsi un support d'innovation et  d’expérimentation de nouveaux modes de gestion et de fonctionnement de la ville. 

Exemple

Schéma récapitulatif des concepts

SCHEMA urbanismes copie.jpg

Réalisation par l'équipe d'étudiant.e.s, en octobre 2020.

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